ELECTIONS PROFESSIONNELLES ET PRINCIPE DE MIXITÉ DES CANDIDATURES

COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, 9 MAI 2018, N°17-14.288

Afin d’améliorer la représentativité des femmes au sein des institutions représentatives du personnel, la loi Rebsamen est venue poser un principe de mixité.

A ce jour, et pour chaque collège électoral, les listes de candidats comportant une pluralité de noms doivent, en fonction du nombre de candidatures exprimées (Code du travail, art. L. 2324-22-1, L. 2314-24-1) :

  • être composées d’un nombre de femmes et d’hommes correspondant à la part de femmes et d’hommes inscrits sur la liste électorale en question ;
  • être composées alternativement d’un candidat de chaque sexe jusqu’à épuisement des candidats d’un des sexes.

Dans un arrêt rendu par la Chambre Sociale, l’employeur entendait obtenir l’annulation de l’élection de M. X, alors seul candidat de la liste FO pour le collège « cadres » titulaires de la délégation unique du personnel (DUP) et ce, alors même que le protocole d’accord préélectorale précisait :

  • que ledit collège « cadres » était composé de 77 % de femmes et de 23 % d’hommes ;
  • que 2 sièges étaient au demeurant à pourvoir.

Dans notre affaire, la liste présentée par l’organisation syndicale au titre des membres titulaires de la Délégation Unique du Personnel – collège « cadres», ne comportait qu’un seul candidat en la personne de Monsieur X.

Ainsi, face à une candidature unique, la problématique de la juste proportionnalité entre candidatures femmes/hommes et électeurs femmes/hommes du collège ne fait pas débat.

Cependant, la Cour de Cassation ne le voit pas de cet œil et vient ainsi préciser : « Qu’en statuant ainsi, alors que, deux postes étant à pourvoir, l’organisation syndicale était tenue de présenter une liste conforme à l’article L. 2324-22-1 du Code du travail, alors applicable… ».

Par cet arrêt, les juges affirment qu’en cas de pluralité de sièges, les règles relatives à la représentation équilibrée des femmes et des hommes doivent s’appliquer.

Matériellement, cela signifie que dans le cadre de l’organisation des élections du C.S.E (Comité Social et Economique) avec un collège comportant plusieurs sièges, si une liste ne comporte qu’un seul candidat (et ce même si ce dernier appartient au sexe le plus représentatif au sein de l’entreprise), cette situation n’est a priori plus tolérée, la candidature unique empêchant en effet le respect des conditions réglementaires de mixité des candidatures lorsque le ration femmes/hommes est calculé pour la détermination de la composition des listes.

Pour rappel, lorsqu’il est fait application des règles ci-avant et que le ratio obtenu n’aboutit pas à un nombre entier de candidats à désigner pour chacun des deux sexes, il est procédé à l’arrondi arithmétique suivant :

  • arrondi à l’entier supérieur en cas de décimale supérieure ou égale à 5 ;
  • arrondi à l’entier inférieur en cas de décimale strictement inférieure à 5.

Exemple :

  • un collège « cadres » comprenant 77 % de femmes et 23 % d’hommes ;
  • 2 sièges ouverts ;
  • 2 candidatures présentées.

En application des règles d’arrondi ci-dessus énumérées, les deux candidatures devraient être féminines (2 x 77/100 = 1,54 soit 2 + 2 x 23/100 = 0,46 soit 0).

Mais, la Cour qui exclut dans un premier temps les candidatures uniques en cas de pluralité de sièges à pourvoir, vient également préciser : « Qu’en statuant ainsi, alors que, 2 postes étant à pourvoir, l’organisation syndicale était tenue de présenter une liste conforme à l’article L. 2324-22-1 du Code du travail, alors applicable, interprété conformément à la décision susvisée du Conseil constitutionnel, c’est-à-dire comportant nécessairement une femme et un homme, ce dernier (homme) au titre du sexe sous-représenté dans le collège considéré ».

Ainsi, elle précise que, dans une telle situation, la liste doit nécessairement comporter une femme et un homme.

En pratique, peu importe le résultat du calcul exposé dans l’exemple, en application de cette proportion femme/homme, le nombre de femmes ne peut être égal à 2. La règle de l’arrondi à l’entier supérieur se trouve ainsi purement et simplement écartée et ce, aux fins de respect de la réserve de constitutionnalité en date du 19 janvier 2018 qui prévoit que, la règle de l’arrondi ne saurait (…) faire obstacle à ce que les listes de candidats puissent comporter un candidat du sexe sous-représenté dans le collège électoral.

La règle de l’arrondi ne doit donc pas engendrer au final l’exclusion de l’un ou l’autre sexe en termes de représentation.

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